La Commission de l’Intelligence Artificielle a remis le 14 mars dernier à Emmanuel Macron un rapport attendu sur la situation de la France au regard de l’Intelligence Artificielle. Ce rapport présente 25 recommandations pour faire de la France un « champion mondial » de l’IA et considère qu’il n’est pas trop tard pour le devenir. Dans la compétition qui s’annonce, les entreprises françaises vont devoir s’adapter et les DRH, aux premières loges, vont devoir anticiper les mutations à venir et y préparer leur organisation. Sur les 25 recommandations du rapport, 4 concernent directement les DRH. Nous les avons décryptées pour vous.
L’aube d’une nouvelle ère RH
L’intelligence artificielle est en train de redéfinir le paysage du travail, offrant des opportunités et présentant des défis uniques pour les Directeurs des Ressources Humaines (DRH). Avec seulement 5% des emplois français directement remplaçables par l’IA, mais 95% des postes contenant une majorité de tâches non substituables par l’IA générative, le rapport sur l’IA souligne l’importance cruciale des DRH dans la gestion de cette transition et notamment comment les DRH peuvent insuffler des compétences en IA au sein de leur organisation pour améliorer la productivité et gérer les impacts sur l’emploi.
L’éducation permanente : Anticiper l’impact sur les compétences et emplois
Recommandation 2 : Investir dans l’observation, les études et la recherche sur les impacts des systèmes d’IA sur la quantité et la qualité de l’emploi.
Les offres d’emplois liées au développement et au déploiement de l’IA devraient représenter 1% et 0,5% de l’ensemble des offres dans dix ans, soulignant l’importance de préparer le marché du travail à ces évolutions. La Commission sur l’IA constate que 13,4 % des emplois ont un potentiel d’amélioration grâce à l’IA, tandis que 5,1 % de ces emplois sont considérés comme remplaçables par l’IA.
Les DRH doivent donc identifier les emplois au sein de leur organisation qui bénéficieront de l’IA et ceux qui sont menacés afin d’anticiper les changements induits dans une logique de gestion des emplois et des parcours professionnels (GEPP) et y répondre par des actions adaptées : évolution des postes et des carrières, mobilités internes, compétences à développer, recrutements à effectuer dans les prochaines années etc. Cependant, des freins à la mise en œuvre de ces actions sont mis en avant par le rapport sur l’IA, et les DRH doivent en tenir compte.
Avec seulement 16.000 places disponibles dans les formations françaises en IA au niveau bac +3 en 2021, et un besoin de tripler ce chiffre dans la décennie à venir, il est crucial d’investir dans l’éducation pour répondre aux besoins en développement de l’IA. Mais ces investissements nécessitent du temps avant que les effets souhaités sur le nombre de profils formés à l’IA disponibles sur le marché du travail soient visibles. Face à une pénurie persistante de profils qualifiés en IA, les DRH doivent envisager d’embaucher des candidats qui ne répondent pas entièrement aux critères de formation espérés. Il est essentiel de les intégrer dans des programmes de formation internes dédiés à l’IA développés par l’entreprise. Cette approche permet de combler les lacunes en compétences tout en tirant parti du potentiel de chaque employé.
Point notable, pour cette recommandation #2 « Investir dans l’observation, les études et la recherche sur les impacts des systèmes d’IA sur la quantité et la qualité de l’emploi », le rapport préconise un investissement public de 5 milliards d’euros en 5 ans pour aider les entreprises à anticiper ces impacts. Les modalités ne sont pas définies mais on peut imaginer que les DRH pourront solliciter des aides et des financements pour y parvenir.Stratégies d’avant-garde : Insuffler des compétences IA
Recommandation 7 : Investir dans la formation professionnelle continue des travailleurs et dans les dispositifs de formation autour de l’IA.
La diffusion de l’IA au sein des organisations modifie le contenu du travail d’une grande partie des collaborateurs. Il est donc nécessaire d’aider les collaborateurs à prendre du recul face à ces technologies qui les impactent directement ou indirectement. A ce titre, les DRH ont tout intérêt à former l’ensemble de leurs collaborateurs à l’IA pour les sensibiliser, leur faire prendre conscience des gains en efficacité attendus et lever leurs freins à l’adoption de l’IA.
Pour les postes directement impactés par l’IA, les DRH doivent agir en tant qu’attracteurs de talents et partenaires stratégiques, encourageant l’acquisition de compétences en IA pour booster la productivité. La diffusion de la formation en interne est essentielle afin de permettre la montée en compétences des différents profils. Les DRH doivent alors se concentrer sur le développement des compétences en IA au sein de leur propre main-d’œuvre. Cela nécessite la mise en place de programmes de formation et de développement continus, conçus pour élever le niveau de compétence en IA de tous les employés, pas seulement de ceux travaillant directement avec la technologie. En investissant dans l’apprentissage et le développement, les entreprises peuvent transformer leur main-d’œuvre existante, en s’assurant que chaque employé a la possibilité de contribuer à et de bénéficier de l’ère de l’IA.
La course aux talents IA : Diffuser l’IA
Recommandation 18 : Attirer et retenir des talents de stature internationale avec des compétences scientifiques ou entrepreneuriales et managériales dans le domaine de l’IA.
En complément de la montée en compétences en interne des collaborateurs déjà présents au sein de leur organisation, les DRH doivent identifier et attirer les talents externes dotés de compétences avancées en IA en fonction des besoins identifiés. Ce qui implique de rendre l’entreprise attrayante pour ces profils hautement qualifiés. Cela passe par la création d’un environnement de travail innovant, offrant des défis stimulants et des opportunités de développement professionnel en lien avec l’IA.
Dans la course aux talents qui risque d’être très dure, il y a toujours la possibilité pour les DRH de développer des talents en interne à travers divers programmes de formation internes pour compléter les besoins.
Avec des investissements français dans l’IA générative vingt fois inférieurs à ceux des États-Unis, le rapport recommande la création d’un fonds de 10 milliards d’euros, soulignant l’urgence d’accélérer l’adoption de l’IA.
Le dialogue social : La clé d’une intégration réussie de l’IA
Recommandation 3 : Faire du dialogue social et professionnel un outil de co-construction des usages et de régulation des risques des systèmes d’IA.
Les DRH doivent placer le dialogue social au cœur de l’intégration de l’IA, en utilisant ces échanges comme un moyen de co-construire les applications de l’IA au sein des organisations et de gérer ses risques. Cela signifie l’implication active des employés et de leurs représentants dans les discussions sur l’adoption de l’IA, son impact sur les postes des collaborateurs, en veillant à ce que les préoccupations en matière de Qualité de Vie au Travail (QVT) soient prises en compte et que les avantages de l’IA soient équitablement partagés.
En conclusion : Les DRH au cœur de la révolution IA
Comme ils l’ont fait par le passé pour accompagner la transformation numérique, les DRH jouent et vont jouer un rôle déterminant dans l’adoption réussie de l’IA au sein des entreprises françaises. En agissant comme des leaders dans l’acquisition de compétences en IA, en définissant les usages internes de l’IA, et en préparant les employés aux évolutions du marché du travail, ils peuvent assurer une transition harmonieuse vers l’ère de l’IA.
Les entreprises françaises ayant adopté l’IA en 2018 ont connu une croissance supérieure à celles qui ne l’ont pas fait, illustrant que les gagnants de demain sont ceux qui embrassent aujourd’hui le virage de l’IA.
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