À la question de savoir si « Les jeunes cadres rêvent ils vraiment de devenir manager ? », posée dans un article de l’APEC en 2023, on découvre que la première source de rejet du rôle managérial réside dans le fait que de nombreux jeunes estiment ne pas avoir LA personnalité requise pour ce poste. Mais existe-t-il réellement « UNE » personnalité de manager ? Selon des croyances persistantes, certains d’entre nous seraient « faits pour le management », quand d’autres devraient surtout se tenir éloignés de ce rôle
En 2022, plus de 30 % des salariés déclaraient occuper une fonction d’encadrement. Difficile de croire que tous ces individus, avec des histoires, des valeurs, des expériences, des compétences, des contextes d’exercice tous plus différents devraient tendre vers une sorte de personnalité unique. Ce serait même inquiétant que ce soit le cas.
C’est là que les outils de connaissance de soi peuvent être utiles. Qu’on s’entende, il ne s’agit pas de la solution miracle qui va faire de vous un « bon » manager. D’ailleurs, c’est quoi, un bon manager ? On pourrait en discuter.
En revanche, mieux se connaitre, c’est comprendre ses modes de fonctionnement, ses réactions face à certaines situations, ses préférences naturelles… et au contraire ce qui va nous demander plus d’effort. C’est comprendre aussi comment on peut être perçu par ses collègues.
Avec parfois quelques surprises et décalages sur ce qu’on pense faire, et ce qui est réellement vu par les autres. C’est aussi, en conséquence, comprendre que l’autre a des modes de fonctionnement qui lui sont propres – souvent différents des nôtres d’ailleurs, c’est là toute la richesse.
En tant que manager, s’appuyer sur la connaissance de soi, c’est pouvoir mieux mobiliser les appétences et les préférences de son équipe, et cela constitue un levier puissant de motivation et d’engagement, et donc de performance. C’est l’un des outils clés du leadership, indispensable pour adopter une logique de management plus individualisée.
Prenons un exemple : Un manager qui préfère avoir la vision d’ensemble et agir rapidement, peut potentiellement ressentir de l’impatience face à un collaborateur qui a besoin de poser le détail de son raisonnement pour expliquer et légitimer le résultat obtenu. En avoir connaissance, c’est déjà anticiper et limiter sa frustration. Prendre le temps d’écouter le collaborateur, c’est sans doute mieux comprendre sa problématique, et donc valoriser le travail qu’il a réalisé. Et peut-être mieux lui exprimer ce qu’on attend, l’accompagner pour synthétiser davantage ? Il ne s’agit pas d’imposer à l’autre de changer, mais de mieux s’aligner pour trouver un terrain d’entente satisfaisant.
Quels sont les outils de connaissance de soi ?
Il existe plusieurs outils destinés à aider les managers à mieux se connaître et à comprendre leur style de leadership. Parmi les plus couramment utilisés, on trouve les questionnaires de personnalité prospectifs tels que le DISC, le MBTI (ou son équivalent le CCTI), le SOSIE et le Big Five.
Questionnaire. Pas test. On n’évalue pas une personnalité. Il n’y a pas de meilleure personnalité plutôt qu’une autre pour exercer des fonctions managériales. Il y a des personnalités qui vont davantage s’adapter à un contexte, à une culture d’entreprise, aux contraintes organisationnelles de certains métiers.
Chacun de ces outils offre une perspective unique sur les traits de personnalité et leur influence sur le comportement managérial. Par exemple, le modèle DISC aide à comprendre les préférences comportementales dans un environnement professionnel, tandis que le MBTI ou le CCTI se concentrent sur les inclinations psychologiques. Dans tous les cas, choisissez toujours des outils s’appuyant sur des études scientifiques, et pour lesquels il est nécessaire d’être accompagné par un.e consultant.e certifié.e pour pouvoir les appréhender.
Un autre outil précieux est le 360° Feedback, qui fournit une vue d’ensemble sur la perception du manager par ses collègues, ses collaborateurs et ses supérieurs. Cette approche permet de comparer la perception qu’a le manager de lui-même avec celle de son entourage professionnel, offrant ainsi une compréhension plus nuancée et complète de son impact sur les autres.
Enfin, cela parait évident, mais poser la question, à ses équipes, de leurs préférences, de ce qu’elles aiment faire, comment elles apprécient de fonctionner, de communiquer, c’est déjà un levier fort de connaissance de soi et des autres, et résolument efficace.
Mais concrètement, qu’est-ce qu’on observe, quand on parle de personnalité ?
Les thématiques observées sont différentes et vont dépendre du questionnaire utilisé. On retrouve quand même quelques constantes : la relation à la réflexion et à l’action (est-ce que j’agis ou je réfléchis d’abord ?), les éléments pris en compte pour décider (les faits, les objectifs, l’équilibre de son environnement et des personnes ?) ; le besoin de cadre et d’organisation ou encore l’importance accordée au détail ou à la vision d’ensemble. L’ensemble des thématiques croisées entre elles permettent de construire un profil de personnalité, qui va décrire les comportements préférentiels de chacun, ses styles d’interaction et de communication avec les autres.
N’est-ce pas un peu réducteur, « d’assigner » un profil de personnalité à chacun ?
Bien sûr, si on le prend comme une vérité absolue et immuable. Le but n’est pas de classer les collaborateurs dans des cases pour ne plus les laisser en sortir. La connaissance de soi, c’est comprendre ses préférences dans un contexte d’organisation donné, à un moment précis de sa carrière. Sans doute qu’il y aura des constantes, des caractéristiques que l’on retrouvera chez un individu en début et en fin de carrière. Mais toutes les expériences et situations vécues ont nécessairement un impact sur les comportements et l’expression de la personnalité
Par ailleurs, qui dit « préférence » ne dit pas « immobilisme ». Chaque individu, heureusement, a la capacité de sortir de sa zone de « confort », de s’adapter à son environnement et à la situation, d’agir de façon complètement inattendue par rapport à ce qu’on connait de lui. C’est pour ça que pour les managers, la connaissance de soi et des autres est un outil intéressant, qui va lui permettre de faire preuve d’agilité mais pas une baguette magique, qui va fonctionner à tous les coups.
Quand recourir à ce type de démarche ?
Vous pouvez travailler sur la connaissance de soi pour de l’accompagnement individuel, ou de l’accompagnement collectif.
En individuel, c’est un point de départ intéressant pour « objectiver » son approche managériale, par exemple lors de la mise en place d’un plan de développement individualisé, ou pour un coaching. Cela permet de prendre du recul sur les effets, positifs ou limitants, que peuvent produire ses comportements sur soi et sur les autres.
Ces outils peuvent aussi être utilisés lors des parcours de formation au management et au leadership, là aussi comme point de départ pour développer ensuite sa pratique. Ils ont par ailleurs la vertu de développer une grille de lecture commune pour l’ensemble des participants à ses parcours, ce qui peut encore davantage renforcer la compréhension de l’autre et faciliter les interactions.
Dans une équipe, enfin, c’est un outil intéressant pour comprendre comment chacun se positionne dans le collectif, d’où peuvent venir les incompréhensions, les manières différentes d’aborder une problématique. Et d’identifier qui va pouvoir venir à certains moments « ré-équilibrer » un collectif avec une personnalité et des modes de fonctionnement un peu différents des autres.
Finalement, la connaissance de soi est un élément clé d’un leadership efficace. Les managers conscients de leurs préférences sont mieux équipés pour comprendre leur impact sur les autres et ajuster leur comportement en conséquence. Cela leur permet de communiquer plus efficacement avec leur équipe, d’adapter leur style de leadership en fonction des besoins de ses interlocuteurs et de diriger plus efficacement leurs équipes vers des résultats performants.
Former des managers à la finesse des mécanismes des relations de travail, c’est aussi former des leaders capables d’aligner plus efficacement leurs équipes avec la stratégie de l’organisation. Ainsi, investir dans la connaissance de soi est une démarche qui, au-delà de renforcer la compétence individuelle, contribue à l’épanouissement collectif et à la réussite organisationnelle.