Personne n’est parfait. Cette phrase banale mais vraie s’applique aussi aux managers. A la tête des équipes et des projets, il repose sur leurs épaules une responsabilité certaine : à la fois garant d’un travail bien fait et d’une bonne ambiance, ils doivent être en mesure de voir ce qui va … et ce qui va moins bien. Et quand cela va moins bien, ils font de leur mieux pour améliorer la situation. Pourtant, parfois, les choses n’évoluent pas forcément dans le sens voulu par le manager - voire même, n’avancent pas du tout. Les solutions misent en place ne sont alors visiblement pas les bonnes. Mais pourquoi ne le sont-elles pas ?
Dans ce dossier en trois volets pour et par les managers, ConvictionsRH présente les “fausses bonnes solutions” que l’on met souvent en place, les raisons de leurs échecs ainsi que les clés de compréhension et de réponses à chacune des situations.
Nous analyserons dans chaque article, trois sources de “fausses bonnes solutions” :
– dans ce premier article, l’illusion de la réalité.
– dans le second, le sentiment du manager qu’il ne peut rien faire pour faire évoluer la situation.
– dans le dernier, l’obstination de certains managers à mettre en place des solutions qui ne fonctionnent pas.
Bonne lecture !
4 raisons d’une perception erronée de la réalité
1. Croire qu’il existe un manager modèle
C’est un comportement commun que de vouloir toujours se présenter sous son meilleur jour, en cultivant l’apparence de maîtrise et de sérénité. Le monde du travail ne fait pas exception à ce principe. Nous pouvons nous enfermer dans des idées préconçues sur ce qu’est un “bon” manager, sur ce qu’il devrait être en mesure de faire. Cela peut nous amener à nous dévaloriser et à se comparer aux autres. Comment se sentir à la hauteur face à une telle pression ?
Loin d’être constructive, cette posture peut avoir des conséquences néfastes pour nous , mais aussi pour nos équipes. Par exemple, si notre équipe fonctionne bien et travaille bien, mais que nous pensons qu’elle devrait augmenter ses résultats et sur-performer, nous risquons non seulement d’épuiser nos collaborateurs, mais également de nous fatiguer nous-même. Rappelons-le, le mieux est parfois l’ennemi du bien !
→ La solution :
L’une des premières choses à faire est de s’ancrer dans les faits et de ne pas laisser ses illusions prendre le dessus : les résultats opérationnels sont-ils satisfaisants ? L’ambiance de travail est-elle bonne ? Les collaborateurs se sentent-ils reconnus et épanouis dans leur emploi ? Ensuite, rappelons-nous que le manager, comme n’importe quel individu, n’a que deux mains. Alors, au lieu de chercher la perfection sur tous les tableaux, cherchons les deux aspects qui nous dérangent le plus et concentrons-y nos forces.
2. Penser que NOTRE réalité est LA réalité
Il n’existe pas de réalité uniforme. C’est une construction de l’esprit, différente selon les expériences, l’éducation et les valeurs de chaque individu. Ainsi, si nous demandions à plusieurs personnes de dessiner une carte d’un même endroit, il y aurait autant de cartes que de dessinateurs. Pourtant, aucune de ces cartes ne serait conforme à 100% à la réalité : “la carte n’est pas le territoire !”. Il est difficile de se séparer de notre réalité et d’accepter celles des autres. Nous nous accrochons à nos convictions, ignorant au passage celles des autres, ce qui nous empêche de comprendre certaines situations et d’agir de façon adaptée.
Par exemple, imaginons que nous considérons qu’il est important de s’intéresser à la vie personnelle de nos collaborateurs pour mieux les comprendre et mieux travailler avec eux. Pourtant, l’un d’eux n’en parle pas et reste très évasif. Nous nous disons alors qu’il y a un problème et lui posons encore plus de questions pour vérifier que tout va bien. Du point de vue de mon collaborateur, il faut – au contraire – mettre une barrière entre vie personnelle et vie professionnelle, il ne répond donc pas à nos questions et est de plus en plus mal à l’aise quand nous lui en posons.
Un autre exemple est celui des managers qui sont durs avec leur équipe. La meilleure manière d’apprendre à nager ne serait-elle pas de se lancer à l’eau sans bouée ? Si cela fonctionne pour une partie de nos collaborateurs, cela laisse de côté ceux qui ont besoin de plus de temps et d’encouragements, et qui pourtant, peuvent devenir de très bons nageurs.
→ La solution :
Confrontons nos réalités. Non seulement cela permet d’élargir le champ de perception de toute l’équipe, mais cela permet également d’entamer le dialogue. Attention donc à ce que l’atmosphère soit bienveillante : pas question de critiquer ou de se moquer de la réalité d’un collaborateur !
3. Mal interpréter le comportement des autres
Il est normal d’interpréter le comportement des autres, il s’agit là d’un trait naturel. Nous prenons les faits extérieurs et les interprétons pour leur donner un sens logique – lié à notre propre réalité.
Par exemple, si un de nos collaborateurs sourit quand nous le félicitons, nous interprétons cela comme un signe qu’il est heureux et qu’il apprécie le compliment. Par contre, s’il se raidit quand nous lui confions une nouvelle mission, nous pouvons interpréter cela comme le signe que quelque chose ne va pas, ce qui nous amène à nous questionner : est-il surchargé de travail ? Se sent-il à la hauteur de la tâche ? A-t-il besoin d’être rassuré ? Ce premier niveau d’interprétation est utile car cela permet d’entamer le dialogue avec notre collaborateur.
Mais attention, toute interprétation n’est pas vérité ! Par exemple si, sans en avoir discuté avec notre collaborateur, nous déduisons qu’il est surchargé de travail et donc que nous décidons de lui retirer une partie de ses tâches, nous risquons de passer à côté d’un problème ou d’aggraver la situation. Le collaborateur pourra avoir l’impression d’avoir été mis au placard et de ne pas avoir notre confiance. Le degré d’interprétation que nous pouvons nous permettre dépend de notre connaissance de l’équipe et de chaque collaborateur.
→ La solution :
Pour éviter de faire des hypothèses sur son collaborateur, il est donc nécessaire de toujours partir des faits, du réel. L’idéal reste toujours d’en discuter directement avec l’individu en question pour comprendre les raisons de cette réaction.
4. Projeter nos propres émotions et réactions sur celles d’un collaborateur
Assez proche de l’interprétation, la projection consiste à imaginer ce que l’autre va ressentir ou penser lors d’une action qui ne s’est pas encore produite. Elle ne peut donc pas s’appuyer sur des faits.
Facile à reconnaître, on se projette souvent lorsque l’on commence nos phrases et nos pensées par “si je …, alors il(s) …” : “si je dis non à mon collaborateur, alors il va penser que je ne l’apprécie pas et m’en vouloir”, “ si j’arbitre cette décision, alors ils vont me trouver autoritaire” …
Bien souvent, ce sont nos propres émotions que nous projetons. Par exemple, un de nos collaborateurs sur-performe, nous pensons déjà à la promotion que nous allons lui donner. Il doit en rêver. C’est peut-être le cas … mais peut-être pas. Ne confondons pas nos envies et celles du collaborateur. Pour cela, rien de plus simple, il suffit de lui demander “de quoi as-tu envie ? Que souhaites-tu ?”.
Un autre exemple est la manière dont on cherche à aider un collaborateur face à une difficulté. Nous déployons des efforts pour l’aider, lui proposons d’alléger sa charge de travail. Pourtant, ce n’est pas forcément ce qu’il aurait voulu. Résultat : il se sent incompris et, de notre côté, nous sommes déçus de voir que ce que nous avons mis en place n’est pas valorisé.
→ La solution :
Dialoguer avec le collaborateur et lui laisser la place de s’exprimer. Avant d’avoir recueilli son ressenti face à la situation, il ne sert à rien de mettre en place une action censée lui venir en aide ou le soulager, le risque étant que cela soit contre productif. Demandons-lui : “que puis-je faire pour t’aider ? De quoi est-ce que tu as besoin ?”
Ce qu’il faut retenir :
Nous venons d’aborder 4 façons de se méprendre sur la réalité. Et, quand nous ne voyons pas bien, impossible de trouver la bonne solution. Alors, pour essayer d’éviter de tomber dans ces pièges, changeons de lunettes ! Voici les trois règles d’or à suivre :
- Toujours s’appuyer sur des faits : ce que l’on croit est-il le fruit de preuves vérifiables ou le résultat de notre pensée et réflexion ? Quand le feu est vert, il est vert, il s’agit de la réalité. Par contre, quand nous considérons qu’un collaborateur a besoin de cela, ou qu’un manager devrait faire ça,nous nous appuyons sur notre propre vision.
- Rester ouvert à la réalité des autres, quand bien même celle-ci nous semble insensée. Se fermer et rester campé sur nos positions est la meilleure façon d’envenimer la situation et de couper court au dialogue. Alors, changeons notre fusil d’épaule, soyons souples et sachons faire preuve d’inventivité.
- Arrêter de penser à la place de nos collaborateurs ! Malheureusement (ou heureusement d’ailleurs), nous ne possédons pas de don de télépathie alors inutile de projeter nos sentiments, nos peurs ou nos attentes à nos collaborateurs ni d’interpréter leurs réactions.
Dans la deuxième partie de ce dossier, nous verrons que souvent, une autre des raisons pour laquelle nous n’arrivons pas à faire évoluer des situations est que nous sommes persuadés que nous n’avons pas de rôle à jouer. Pourquoi cela n’est-il pas entièrement vrai ? Comment sortir de cette attitude ? Réponses dans notre deuxième article. A bientôt !
Aux côtés des managers tous les jours, ConvictionsRH sait bien qu’ils se retrouvent parfois dans une position difficile, entre l’envie de bien accompagner leurs équipes, leur réalité opérationnelle et les orientations stratégiques qu’ils doivent décliner sans toujours bien comprendre le « comment ? ». C’est pour cette raison que nous avons créé Minutes Management, un podcast pour les managers qui répond à leurs questions et leurs besoins. Retrouvez tous les épisodes ici.