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23 milliards d’euros, pas mal pour un lundi !-convictionsrh

Destinée à améliorer la prise en charge des personnes âgées, la journée de solidarité avait initialement été fixée au lundi de Pentecôte et l’est restée dans de nombreuses entreprises. Cette journée de travail supplémentaire, non rémunérée et accomplie par tous les salariés, aurait rapporté plus de 23 milliards d’euros entre 2004 et 2014. Paradoxalement, la ministre déléguée chargée des Personnes âgées et de l'Autonomie Michèle Delaunay expliquait en 2013 que seulement 20 % de salariés environ travaillent effectivement le lundi de Pentecôte. Explications.

 

Le principe

Créée par la loi du 30 juin 2004 à la suite de la canicule meurtrière de 2003, la  journée de solidarité a été initiée pour financer des actions en faveur des personnes âgées ou handicapées, et notamment améliorer le degré et la qualité de leur prise en charge.
Concrètement, l’employeur verse périodiquement une cotisation patronale de 0,30% sur l’ensemble des rémunérations et gains salariaux soumis à la contribution patronale au titre de l’assurance maladie. Les montants collectés sont reversés, via les URSSAF, à une caisse spécifique dite « caisse nationale de solidarité pour l’autonomie ». Chaque salarié doit, en contrepartie, travailler une journée supplémentaire non payée par an.
En l’absence d’accord collectif de branche ou d’entreprise, la loi a fixé la date de cette journée le lundi de Pentecôte, soit en cette année 2015 le 25 mai prochain.

 

Accord, pas d’accord

Cependant, la loi permet également aux partenaires sociaux de fixer la date de la journée de solidarité en signant un accord collectif de branche ou d’entreprise. Ce dernier doit clairement préciser la journée retenue, qui peut être :

. Un jour férié précédemment chômé à l’exception du 1er mai,
. Un jour de RTT,
. Tout autre jour précédemment non travaillé,
. Une journée fractionnée en 7 heures de travail supplémentaires par an.

Cependant, lorsque l’accord a fixé comme journée de solidarité un jour au cours duquel certains salariés ne travaillent pas, l’employeur peut choisir un autre jour après consultation du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel. Le fait qu’il n’existe pas d’accord collectif ne signifie pas pour autant que la journée de solidarité se tiendra le lundi de Pentecôte dans toutes les entreprises. L’employeur peut en effet déroger à cette règle après avoir consulté le comité d’entreprise ou les délégués du personnel dans les cas suivants :

. Lorsque les salariés travaillent déjà le lundi de Pentecôte
. Lorsque le lundi de Pentecôte est habituellement un jour non travaillé et non chômé pour certains salariés : repos hebdomadaire le lundi dans les commerces, salariés à temps partiel ne travaillant pas le lundi…
. Lorsque l’entreprise est ouverte toute l’année, auquel cas l’employeur peut fixer une journée différente pour chaque salarié.

On notera que le lundi de Pentecôte demeure un jour férié légal. Par ailleurs, un dimanche ou un jour de congé payé légal ne sauraient être retenus comme journée de solidarité. Ne peuvent être choisis que des jours de congé supplémentaires conventionnels.

 

Bilan : des hauts et débat

Au-delà des problématiques opérationnelles purement RH, quel bilan tirer de cette journée de solidarité ? Selon la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), elle aurait rapporté en dix ans plus de 23,5 milliards d’euros. Le contrat semble donc rempli sur le plan d’une « solidarité utile » aux personnes âgées ou en état de grande dépendance.

Pourtant, la mesure continue de faire débat, notamment chez certains syndicats. La CFTC continue ainsi, chaque année, d’écrire au ministre du Travail pour l’inciter à « réparer une injustice » en arguant que tout travail mérite salaire. Elle couvre aussi, par un mot d’ordre de grève, tous les salariés qui choisiraient de ne pas travailler le lundi de Pentecôte ou tout autre jour imposé par leur employeur au nom d’une « fausse solidarité ». Du côté du patronat, qui accueillit favorablement la mesure à sa sortie, ce lundi de Pentecôte devrait idéalement s’accompagner d’une réduction drastique des jours fériés pour « en finir avec les ponts de mai » selon les mots de Pierre Gattaz.

Réputés pour impacter négativement la compétitivité des entreprises françaises, les week-ends à rallonge de mai sont-ils nuisibles à toutes les entreprises ? Difficile de répondre catégoriquement à cette question. Chaque mois de mai, les professionnels du tourisme français arborent un beau sourire, et pas seulement les hôteliers et restaurateurs. Ainsi la SNCF se félicitait-elle, pour la période du 7 au 12 mai 2013, d’un taux d’occupation de 95% de ses TGV…